« Le Maitron » publie notice biographique Filoche (7 nov 2020) https://maitron.fr/spip.php?article233874, notice FILOCHE Gérard (Roger Norman, Matti, Matti Altonen). par Jean-Paul Salles, version mise en ligne le 7 novembre 2020, dernière modification le 7 novembre 2020.

FILOCHE Gérard (Roger Norman, Matti, Matti Altonen).

Né le 22 décembre 1945 à Sotteville-lès-Rouen (Seine-Inférieure, Seine-Maritime)  ; étudiant en philosophie et militant du PC, de l’UEC, de l’UNEF à Rouen en 1964-66, puis militant de la JCR, de la LC/FCR/LCR, président de l’AGER-UNEF de Rouen, membre du CC puis du BP de la LC/LCR de 1969 à 1994, et de la direction de la QI-SU pendant plus de 15 ans, animateur d’une tendance minoritaire  ; puis militant du PS de 1994 à 2018, membre du Conseil national et du Bureau National. Il fut un des animateurs de la tendance la Gauche socialiste, il créa et dirigea le mensuel Démocratie et Socialisme, exerça une dizaine de métiers pendant onze ans dans le privé (dont moniteur, éducateur, pion, professeur, manutentionnaire, chauffeur-livreur, conducteur de train, facteur), devint permanent de la Ligue (journaliste, imprimeur), puis contrôleur du travail en 1982 et Inspecteur du Travail à partir de 1985 jusqu’à sa retraite en 2010  ; depuis 2018, militant de la Gauche démocratique et sociale (GDS).

 

Gérard Filoche est né à Sotteville-lès-Rouen (Seine-Maritime), ville de tradition cheminote. Son père René, né à Argentan (Orne) dans une famille ouvrière de sept enfants, avait été engagé comme chaudronnier-menuisier aux chemins de fer (au dépôt de Rouen-Orléans) en 1935, l’année de son mariage. Très habile de ses mains, il fabriquait les meubles pour la famille et le voisinage. Installée d’abord dans la maison louée rue des Anglais dans le quartier de Rouen-Saint-Sever, rive gauche près de la Maison d’arrêt, la famille acquit une maison rue Edison, au Madrillet, à Sotteville-lès-Rouen. Son père entretenait des jardins autour de la maison. N’ayant pas eu le Certificat d’études, quasiment analphabète, René Filoche se contentait de lire les titres du quotidien local, Paris-Normandie. Arrêté dans les Ardennes, il subit la captivité de 1940 à avril 1945 en Allemagne. Sa mère Antoinette Leborgne, dont le père était mort à Verdun, était particulièrement fière des bons résultats scolaires de son fils à l’école Marcel Sembat. Courageuse, elle devint aide-soignante et passa le permis de conduire à 50 ans.
Les années d’apprentissage.


Ayant commencé à s’intéresser à la politique par la télévision que la famille acheta dès 1957, c’est par celle qui allait devenir sa femme qu’il fut véritablement initié à la politique. Françoise Le Toullec, de trois ans son aînée, qu’il rencontra en 1960, était fille de cheminot elle aussi. Son père Marcel, communiste depuis 1920, ancien résistant FTP, avait coutume de dire à son gendre : « Sois le plus rouge possible, mon garçon, tu blanchiras bien assez tôt ». Scolarisé au collège-lycée Fontenelle, non loin de l’Hôtel de Ville de Rouen, il fut précocement saisi d’une boulimie de lecture, lisant pêle-mêle les classiques mais aussi les contemporains, comme les auteurs du Nouveau Roman. Mais parallèlement, inscrit au Stade Sottevillais Cheminot Club (SSCC), il se passionna pour la natation et lui, le fils unique, se lia joyeusement aux garçons et aux filles de son âge. Grâce à la gratuité dont ils bénéficiaient à la SNCF, avec Françoise ils découvrirent Paris, le Louvre et les théâtres mais aussi Barcelone, Madrid ou Amsterdam. Avec peu de moyens, ils firent aussi des voyages en autostop en Grèce et en Turquie. Chassé de son lycée en classe de Première, six mois avant le Bac (première partie), pour « mauvais esprit », il obtint l’examen après avoir travaillé seul. Réadmis en Terminale, seul garçon au lycée de filles (alors non mixte) des Bruyères à Sotteville-lès-Rouen, il se passionna pour la philosophie. Il eut le privilège d’être invité avec d’autres lycéens à des soirées de discussion organisées par un groupe de professeurs de philosophie de Rouen. Ce fut son premier contact avec des enfants scolarisés aux prestigieux lycées Corneille et Jeanne d’Arc. Inscrit en 1963 en philosophie à l’université de Rouen située sur la colline de Mont-Saint-Aignan, un nouveau monde s’ouvrit à lui, celui de la connaissance. Sur proposition d’une agrégée de philosophie, la professeure Marie-Claire Lascaut, la pénurie de professeurs étant grande à l’époque il enseigna la philosophie pendant 6 mois dès sa première année d’études supérieures au lycée des Bruyères qu’il venait de quitter, en remplacement de sa professeure en congé maternité. Il obtint la licence et le certificat de maîtrise de philosophie. Parallèlement il adhérait au PC, s’investissant surtout à l’UEC et à l’UNEF, animée par Jean-Marie Canu, président de l’Association générale des étudiants rouennais (AGER-UNEF), mais aussi par Denis Marx ou Jean-Claude Laumonier. La grande maison de la mère de ce dernier, boulevard de la Marne, accueillait le petit groupe de militants. Le premier combat auquel ils participèrent eut pour objet le retrait du Plan Fouchet (1966) qui envisageait une orientation précoce et contrainte des étudiants. Lors d’une manifestation, surpris et dopés par le nombre d’étudiants réunis, environ 2000, au lieu de rejoindre directement le meeting intersyndical, ils se dirigèrent vers le commissariat pour obtenir la libération d’un de leurs camarades, Michel Dupont, alors anarchiste, arrêté en début de manifestation. Mécontent de voir un dirigeant étudiant détourner une manifestation pour libérer un anarchiste, le soir même le professeur d’histoire et dirigeant communiste Claude Mazauric le traita de « trotskiste ». Ce fut Denis Marx qui le mit en contact avec Alain Krivine. Ce dernier, venu à Rouen pour le rencontrer, lui expliqua les débats qui agitaient l’UEC à Paris, entre les « Italiens », les « Maoïstes » et « l’Opposition de gauche ». Le contact était pris, de nombreux voyages à Paris lui permirent de connaître Hubert KrivineJanette Habel ou Catherine Samary et de se rapprocher ainsi de militant(e)s déjà membres du PCI, section française de la Quatrième Internationale-Secrétariat Unifié (QI-SU). Filoche alla fréquemment à partir de là, à des réunions parisiennes de l’UNEF, de l’UEC, du PCI, du CVN (Comité Vietnam National avec Laurent Schwartz). Adhérent, il fut affecté à la cellule Haute-Normandie du PCI, il y retrouva des professeurs, des étudiants, dont Marc-André Gluck, André Rosevègue, son ami Denis Marx, mais aussi un vieux cheminot autodidacte, Charles Marie, et un dirigeant syndical de Vernon,  Jack Houdet, salarié du LRBA (Laboratoire de recherche et de balistique appliquée) qui l’impressionnèrent fortement. Avec de jeunes ouvriers de Sotteville, il participa à la manifestation internationale de Liège le 15 octobre 1966 contre l’OTAN et la guerre du Vietnam. Il contribua à créer le Comité Vietnam National (CVN) à Rouen, très actif sur le campus, organisant « Six heures pour le Vietnam » en soutien au FNL vietnamien au Cirque de Rouen, une salle importante. Environ 1500 personnes assistèrent au meeting, écoutant des activistes américains (Mary-Alice Waters) et aussi les représentants du FNL, des artistes comme Colette Magny et Mouloudji.
Mis en accusation par sa cellule du PCF pour être allé à Liège, celle-ci dut s’y reprendre à deux fois pour l’exclure. N’ayant pas réussi à réunir une majorité pour l’exclusion le 22 octobre 1966, c’est le 16 novembre, en présence du secrétaire fédéral, au bout de quatre heures de réunion, qu’il fut non pas « exclu » mais « suspendu », jusqu’à ce qu’il fasse son autocritique en tant que « maoïste ». Bien qu’il fût déjà un militant aguerri malgré son jeune âge, il a été traumatisé par ce déchaînement de haine, « comprenant qu’en d’autres temps on m’aurait lynché » (Filoche, 1998, p. 41). Il fut longtemps poursuivi par la haine de ses anciens camarades, traité « d’homme de main gauchiste bien connu » (in Nouvelles de Seine-Maritime, supplément à l’Humanité-Dimanche n° 244, 9 novembre 1969). Exclu également de l’UEC, suite à un tract jugé trop anticlérical, à propos de l’interdiction du film « La Religieuse » de Jacques Rivette par le ministre de la culture gaulliste Yvon Bourges, il participa à la création du groupe JCR de Rouen – et se retrouva à la présidence du 1er congrès de la jeune organisation qui eut lieu à Paris les 24-27 mars 1967-, alors même qu’il se faisait exclure du congrès de l’UEC de Nanterre. Avec une cinquantaine de militant(e)s, le groupe JCR de Rouen était le groupe de province le plus important. Il publiait un journal ronéoté, l’Étincelle. Tout en militant et en poursuivant ses études de philosophie, il travaillait l’été à la SNCF et enchaînait une dizaine de « petits boulots » (moniteur, manutentionnaire, chauffeur livreur, facteur…) dans l’année scolaire. Puis il fut « pion » dans divers lycées de Rouen. C’est au cours d’une distribution de tracts sur le Vietnam au Restaurant universitaire, le 12 janvier 1967, qu’un commando de militants d’Occident fondit sur lui et ses camarades, laissant sur le pavé plusieurs blessés graves dont Laurent Marx et Serge Bolloch victime d’une fracture du crâne. Les agresseurs, parmi lesquels Alain Madelin, Robert Longuet et Patrick Devedjian, étaient venus de Paris. Les 17 et 18 février 1968, avec certains de ses camarades de Rouen – deux cars avaient été remplis – il participa à la manifestation internationale de soutien à la lutte du peuple vietnamien à Berlin, aux côtés de Rudy Dutschke notamment. Dès le 5 mai 1968, il appela à la grève générale à la Faculté de lettres de Rouen, en solidarité avec les étudiants parisiens, et des milliers d’étudiants et lycéens de Rouen se mirent en grève. Il partit en voiture le 10 mai au soir, de Rouen, avec trois de ses camarades pour se rendre à la nuit des barricades au Quartier latin. À Rouen, l’université étant occupée, des meetings se tenaient chaque jour, et dans le grand amphithéâtre de la Faculté des Lettres, le vieux trotskyste Charles Marie fut écouté avec avidité. G. Filoche participa pleinement aux événements de mai 68 à Rouen, à l’occupation du Cirque, au Boulingrin, fier d’être en train de changer le monde et persuadé désormais qu’il allait pouvoir agir efficacement pour faire advenir un socialisme démocratique différent de celui qui existait prétendument en URSS ou en Chine.
Le militantisme à la LCR.
Ce qui avait manqué en mai 68, pensa-t-il comme ses camarades de la JCR, c’était le parti révolutionnaire. C’est donc à sa construction qu’il allait s’employer. Dès juillet-août, avec ses camarades de Rouen, il va tirer et diffuser sur les entreprises un quatre pages intitulé La Lutte continue, moyen de stabiliser les « contacts » ouvriers. À partir du 18 septembre 1968, le journal Rouge, d’abord quinzomadaire puis hebdomadaire à partir du 1er mai 1969, permit d’organiser militants et sympathisants dans des Cercles rouges. Dans le cadre du débat précédant la fondation de la Ligue communiste au congrès de Mannheim (5-8 avril 1969), il se prononça en faveur du militantisme dans les syndicats à l’encontre de ceux, minoritaires, (notamment Isaac Joshua et Henri Maler, qui devaient rompre et créer Révolution ! puis l’ OCT, Organisation communiste des travailleurs), qui rêvaient de contourner les appareils syndicaux « qui avaient trahi », disaient-ils, en mai 68. Élu au Comité central, dès le lendemain, il fut délégué au IXe congrès de la Quatrième Internationale à Rimini (mai 1969). Les discussions menées en trois langues (anglais, français, espagnol) par les 100 délégués venus d’une trentaine de pays l’impressionnèrent. Les débats furent passionnants, opposant par exemple le vieux trotskyste chinois Peng Tchu Chei qui ne voyait aucune vertu à la révolution culturelle à Livio Maitan qui voyait dans cet événement une sorte de pendant à mai 68. Il y eut aussi les premiers débats sur « la lutte armée en Amérique Latine » qui devaient durer toute une décennie. Puis ce fut la candidature Krivine aux élections présidentielles le 1er juin 1969, précédée de la recherche des signatures de maires dans les campagnes autour de Rouen : « On découvrait une France inconnue […] Cela leur faisait plaisir de nous écouter, de nous parler. Quand ils ne signaient pas, ils s’excusaient » (Filoche, 1998, p.112). Ce fut une campagne « gauchiste », pourtant le « groupuscule » PCI-JCR devenu LC sortit de l’ombre – même si le résultat fut décevant, 239 106 voix, 1,06 % –, il accrut le nombre de ses militants et étoffa son implantation régionale. Gérard Filoche ne se faisait pas prier pour tenir meeting au Havre, à Évreux ou à Caen, mais aussi à Nantes, Orléans, à Sedan ou Amiens. Il signa également de nombreux articles dans Rouge, utilisant son pseudonyme de Roger Norman pour défendre de jeunes ouvriers de Saint-Étienne-du-Rouvray que la justice accusait d’avoir attaqué un commissariat de police (Rouge n°82, 5 octobre 1970, p.3). Il rédigea une brochure à propos de luttes syndicales avec Gilbert Hernot cégétiste de la Vallée de l’Andelle. Il devint « permanent » de la LC à Rouen, puis à Paris. Et, alors qu’ils étaient tous deux opposés au mariage, Françoise et Gérard s’épousèrent sans cérémonie, le 3 mai 1971, pour lui éviter d’aller faire son service militaire en Allemagne. Ensuite, le BP de la Ligue vota pour qu’il se fasse définitivement réformer afin d’occuper toutes ses responsabilités à temps plein dans la direction. Sous son nom il écrivit de plus en plus dans Rouge. Il s’interrogea sur l’évolution des partis de droite (Rouge n° 125, puis n° 127) ou sur François Mitterrand (Rouge n° 132, 13 novembre 1971). Il affirmait le 7 mars 1975 (Rouge n° 290, p.4) : « Il n’est pas de notre classe […] C’est un bourgeois qui condescend à se préoccuper de nous, qui nous veut du bien comme on nous fait l’aumône ». Il participa au débat sur la nature du Parti socialiste qui traversait la LC à cette époque-là. Pour Henri Weber aussi : « Mitterrand est une solution pour la bourgeoisie » (Rouge n° 128, 16 octobre 1971). Pour ce dernier, « la sociale démocratie est définitivement morte ». De même Alain Krivine titrait ainsi son éditorial : « L’agonie de la SFIO » dans Rouge n° 46 (5 janvier 1970). Gérard Filoche partagea et défendit d’abord cette position (« le PS est un parti bourgeois ») avant d’évoluer à la lumière du Programme commun signé avec le PC et surtout du score de François Mitterrand en 1974. Le rôle du PS chilien dans la victoire de l’Unité populaire et aussi la place du PS dans la révolution portugaise de 1974-1975, furent pour lui matière à réflexion. C’est alors qu’il définit le PS « comme un parti ouvrier bourgeois » (selon une expression de Lénine visant le Labour Party et le « Lloydgeorgisme »), ce qui l’incluait dans la politique du « Front unique ouvrier » chère aux trotskystes. Ainsi commencèrent des débats de tendance qui devaient durer des décennies dans la LCR, et au-delà. Puis vint la question chilienne : dès le 20 novembre 1971, Gérard Filoche se demandait si après un an de gouvernement d’Unité populaire, on pouvait vraiment faire la révolution par la seule puissance du mouvement de masse ou si la lutte armée était inéluctable (Rouge n°133, 20 novembre 1971, éditorial). Après le coup d’État du général Pinochet, il participa à la création des comités Chili, qui appelaient à la solidarité avec les travailleurs chiliens, se distinguant de la position de la majorité de la LC (Alain Krivine, Daniel Bensaïd)) qui accusait « le réformisme de désarmer la révolution » (banderole de tête LCR lors de la manifestation aux Invalides, septembre 1973, en réponse au coup d’État) et qui prônait le soutien à la lutte armée révolutionnaire du peuple chilien. Il participa à des réunions de coordination européennes des Comités Chili à Heidelberg ou à Turin. En 1973, il se rendit en Martinique, rencontrant Édouard Delépine, Philippe Pierre-Charles, Gilbert Pago et le guadeloupéen Christian Courbain. Ce dernier était poursuivi en 1972 par Pierre Mesmer, premier ministre, pour avoir dénoncé les conditions de la mort scandaleuse de Gérard Nouvet, tué en marge de la manifestation du 14 mai 1971 contre la politique de Mesmer alors ministre des DOM-TOM. Ce procès fut l’occasion d’une campagne nationale de la LC et du Groupe Révolution Socialiste (GRS). Gérard Filoche fut un des organisateurs de la manifestation parisienne et du meeting à la Mutualité. Ensuite, fin décembre 1973, il représenta l’ex-LC au congrès de fondation du GRS, section antillaise de la Quatrième Internationale qui se tenait dans la maison d’Edouard Glissant.
Il fut, sur la longue durée, organisateur des stages de formation de la LCR, ainsi sept stages d’une semaine lors de l’été 1971 réunissant 600 militant(e)s et sympathisant(e)s à Montargis (Loiret) ou du stage de 3 jours au Manoir de l’Amitié à Pourville-sur-mer près de Dieppe (Seine-Maritime) pendant les vacances de Noël 1971. Il organisa aussi les stages d’été de Bièvres (Essonne), consacrés, en présence d’Ernest Mandel, aux questions internationales en vue du Xe congrès de la Quatrième Internationale. Ensuite ce seront les stages de Bruguières (Haute-Garonne) et en 1992, la première université d’été de la LCR à Saint-Beauzire près de Brioude (Haute-Loire) (Le Monde 6-7 septembre 1992). Aux élections législatives du 4 mars 1973, il fut un des 91 candidats de la Ligue communiste. S’étant présenté dans la 3e circonscription de la Seine-Maritime englobant notamment Sotteville-lès-Rouen, sa ville natale, il n’obtint pas un meilleur score que ses camarades, 689 voix soit 1,29 %. Mais il ne se découragea pas, le plus important était pour lui, l’intervention dans les entreprises et dans les lycées et facultés. Or à Rouen elle était en progrès, la LC, forte de 180 membres, intervenant sur 7 entreprises importantes, les 8 cellules étudiantes ou jeunesse scolarisée apportant leur renfort. Les premières divergences entre Gérard Filoche et la ligne majoritaire de son organisation furent précoces et portèrent sur l’intervention étudiante. Il n’était pas favorable à l’abandon de l’UNEF au profit, comme le proposa Daniel Bensaïd au congrès de Marseille de 1969, de Comités rouges ou de Comités de lutte. Mais en tant que responsable du secteur étudiant, et quoique président de l’AGER-UNEF, il dut, à contrecœur, suivre la stratégie majoritaire et quitter le syndicat pour des « comités rouges ». « Muté » à Paris, à la demande du Bureau Politique, devenu permanent, et membre du Bureau politique depuis le IIème congrès de la LC à Rouen (29-31 mai 1971), il eut du mal à s’intégrer dans cette fonction et dans un groupe parisien dont les membres avaient « de longue date, leurs habitudes, leurs réseaux, leurs liens amicaux et familiaux » (Filoche, 1998, p.146). Il était plus à l’aise dès lors dans les meetings de province et il fit de nombreuses tournées, soit pour soutenir des grèves lycéennes ou étudiantes en 1971-72 (circulaire Guichard, affaire Guiot, blessure de Richard Deshayes – il perdit un œil à la suite d’un tir de grenade à bout portant -, suppression de la deuxième langue vivante), soit, de décembre 1969 à mai 1970, pour la défense des « soldats emprisonnés » (Devaux, Hervé, Trouilleux), avec Michel Rocard alors secrétaire national du PSU (Salles, 2005, p.72-73). Il présenta également dans toute la France le Manifeste de la Ligue communiste (Maspero, 1972). Il contribua aussi à populariser la lutte contre la construction de la centrale nucléaire de Plogoff qui culmina lors de la grande manifestation à la pointe du Raz le dimanche 16 mars 1980 (Salles, 2005, p.226). Responsable des secteurs étudiants et lycéens, avec Michel Recanati et Michel Field, il coordonna la grande mobilisation de la jeunesse scolarisée contre la loi Debré au printemps 1973. Cette loi, votée le 29 juin 1970, remettait en cause la possibilité d’obtenir un sursis au-delà de 21 ans, sauf rares exceptions. La mobilisation de la jeunesse scolarisée fut très importante, mais à cette occasion, à l’intérieur de la Ligue le débat porta sur « l ’unité ou le débordement ». Gérard Filoche était favorable à la création d’un syndicat de collégiens, de lycéens, d‘étudiants et de soldats alors que Michel Recanati et Daniel Bensaïd inclinaient toujours pour des comités rouges. Grâce aux dizaines de milliers de jeunes en manifestation unitaire avec les syndicats dans toute la France, la victoire l’emporta, la loi Debré fut retirée, et dans la Ligue la discussion fut tranchée.
Il avait été responsable pour le BP d’une manifestation unitaire à Paris le 20 juin 1973 contre la répression policière et syndicale. Mais il fut hostile aux modalités de la manifestation du lendemain, le 21 juin 1973, destinée à empêcher la tenue à Paris d’un meeting d’Ordre Nouveau, l’organisation dirigée par Jean-Marie Le Pen, contre « l’immigration sauvage ». Il ne pensait pas que le déploiement de la violence – plusieurs centaines de militants du Service d’ordre attaquèrent la Mutualité aux cocktails Molotov -, en dehors de toute entente avec les forces de gauche et même avec les principales organisations d’extrême gauche comme Lutte Ouvrière, ait été la bonne stratégie. La Ligue communiste fut dissoute, plusieurs de ses dirigeants emprisonnés. Ce fut Gérard Filoche qui représenta la Ligue au meeting du Cirque d’Hiver, organisé par les partis de gauche pour protester contre la dissolution. Il tenta de parler – devant Jacques Duclos, Jean Le Garrec, Daniel Mayer, des photos de presse en témoignent -, mais la parole fut interdite au représentant de l’organisation dissoute. Un vif débat s’engagea, sous le choc, dans la Ligue dissoute, sur le bien-fondé de l’ampleur de la violence déployée. Au Comité central suivant qui se tint en Belgique, Gérard Filoche déposa un texte critique qui n’eut qu’une voix, la sienne. Il en retint qu’il fallait choisir une autre ligne : insister sur la formation, s’attacher au recrutement, construire un parti solide, implanté, et des syndicats de masse. Et militer pour le Front unique de la gauche plutôt que de multiplier les actions spectaculaires ou d’œuvrer à l’unité de l’avant-garde large afin de déborder les appareils des vieux partis de gauche, comme le proposait Daniel Bensaïd, en parallèle à la stratégie de la lutte armée en Amérique latine que soutenait la majorité. En Europe, après « le moment maoïste » de la Gauche prolétarienne (Alain Geismar) en France, ce fut le temps de la Fraction Armée rouge (RAF ou Rote Armee Fraktion) en Allemagne (Andreas Baader), des Brigades rouges en Italie, et aussi celui de l’ETA au pays basque espagnol, de l’IRA en Irlande du Nord. Le débat exista dans la LC, notamment par le biais des Bulletins intérieurs, sur la « réintroduction de la violence au sein du mouvement ouvrier ». Il fit longtemps rage entre les tenants du BI 30 signé par JASA (Jébrac, Arthur, Stéphane, Antoine, respectivement Daniel Bensaïd, Armand Creus, Paul Alliès, Antoine Artous), et ceux du BI 33 signé Matti (devenu le pseudonyme de Filoche après la dissolution). Deux lignes s’opposèrent à partir de là, de congrès en congrès, jusqu’en 1994. La LC dissoute le 28 juin 1973 devint Front communiste révolutionnaire (FCR) en avril 1974, puis LCR en décembre 1974. La deuxième campagne présidentielle menée par Alain Krivine fut un second choc pour Filoche. Le 4 mai 1974, Krivine dut se contenter de 0,36 % des voix, derrière Arlette Laguiller* (2,30 %) : face à « Je suis une femme, une travailleuse, une révolutionnaire », « l’idéologie, le discours propagandiste payait moins qu’un langage simple et imagé » (Filoche, 1998, p.194). Il fallait selon Filoche, parler simple aux travailleurs pour se faire entendre, partir de leurs revendications légitimes, de leurs besoins objectifs, et ne pas utiliser un discours gauchiste réservé à « l’avant garde large » comme le voulait la majorité de la LCR.

Un autre choc fut constitué par le 25 avril portugais (1974) : la révolution initiée par les militaires du Mouvement des forces armées (MFA) propulsa sur le devant de la scène Parti communiste (PCP) et Parti socialiste (PSP), Alvaro Cunhal et Mario Soares, remettant en question l’analyse de la LCR sur la construction directe, par ses soins, d’un « mouvement ouvrier révolutionnaire neuf ». Élections au ou Soviets ? Gouvernement du MFA ou gouvernement PS-PCP ? Du 25 avril 1974 (soulèvement contre Caetano) au 25 avril 1975 (élection de l’Assemblée Constituante) et au 25 avril 1976 (élections législatives), où PSP et PCP obtinrent la majorité absolue, le débat sur la révolution portugaise fut au jour le jour, important. Il se déroula très âprement au sein de la LCR pendant deux ans : allait-on militer pour le Front unique entre PC et PS ou pour le débordement de la gauche ? Filoche
qui se rendit au Portugal en mars avril 1976, résumera ses positions sur ce débat houleux dans un livre, Printemps portugais, paru dix ans après en 1984, chez Actéon. Au milieu des années 1970, il fut affecté par le BP au travail antimilitariste, avec Jean-François Vilar et Alain Brossat notamment, dans le cadre d’une Commission nationale armée (CNA). L’équipe mit sur pied l’Appel des Cent rendu public entre les deux tours de la présidentielle de 1974. Signé par 100 soldats, l’appel était une lettre ouverte aux deux candidats demandant la liberté d’information dans les casernes, le libre choix de la date d’incorporation, une solde égale au Smic et l’abolition des tribunaux militaires (Salles, 2005, p.194). L’Appel des Cent rencontra un fort écho dans les casernes. Malgré la répression, il fut signé par plus de 6 000 soldats, soutenus par des sections syndicales ou unions locales CFDT. Des Comités de soldats se constituaient dans les casernes. Gérard Filoche aurait voulu qu’on avance vers les syndicats de soldats, qu’on rompe avec « l’action des soldats masqués » – c’est ainsi qu’ils défilaient le 1er mai – « pour des soldats agissant à visage découvert » (Filoche, 1998, p.204 et APGF). Or, la majorité de la LCR avait une conception différente, elle voulait plutôt construire un Front des soldats, aviateurs et marins révolutionnaires (FSAMR), plus politisé et donc minoritaire. Il démissionna donc de la CNA fin avril 1978. Ainsi durant les années 1970, le même clivage, unité et travail de masse ou actions exemplaires et débordement, sépara Gérard Filoche du reste du Bureau politique où il continuait d’œuvrer. Cela ne l’empêcha pas de participer à l’aventure du Quotidien Rouge (15 mars 1976-2 février 1979), une expérience qui lui permit, dit-il, de mesurer, jour après jour, l’ampleur des divergences : sur la démocratie, sur le Front unique ou la lutte armée, sur l’appréciation du stalinisme. Ainsi comment annoncer la mort de Mao en septembre 1976, fallait-il titrer « Mort d’un révolutionnaire » comme l’auraient voulu des membres de la majorité ou « Nixon perd son dernier soutien » comme il le proposait de manière un peu provocatrice ? Finalement on s’en tint à « Mao est mort ». Le régime interne de la LC/LCR autorisant les tendances était propice au débat. Il suffisait qu’un appel réunisse 30 noms de titulaires pour que la tendance soit reconnue, qu’elle puisse s’exprimer dans les Bulletins intérieurs et dans Rouge, tenir des conférences nationales et bénéficier d’un budget. Gérard Filoche profita de ce droit démocratique pour appeler à la création d’une première tendance en vue du 1er congrès de la LCR (décembre 1974). Insistant sur le nécessaire investissement dans les syndicats, dans les usines comme à l’université, et demandant à ses camarades de renoncer aux aventures militaristes au profit du « front unique ». Sa tendance, la T1, recueillit 18 % des votes, la tendance majoritaire (la T2) en recueillant 59 %. Le sillon était tracé et au cours des années suivantes, il maintint et développa sa tendance, même si conjoncturellement des alliances furent possibles avec la majorité, notamment au IIIe congrès (janvier 1979). A posteriori, dans ses Mémoires, Alain Krivine tout en notant ses qualités de pédagogue et d’organisateur dénonça son « fractionnisme exacerbé » sous prétexte de lutter « contre les dérives gauchistes de la majorité » (Krivine, 2006, p.163). Selon Gérard Filoche, la majorité tenta de freiner puis de mettre fin à son combat politique interne de différentes façons (censure d’articles sur le Portugal, interdiction de s’exprimer dans Rouge, retrait de ses responsabilités) et décida finalement de le « dépermanentiser » d’août 1977 à août 1978, tout en le maintenant au BP. Il fut embauché dans une entreprise de presse, grâce à son camarade Jean-Michel Vallentin ouvrier du livre. Pendant deux ans, il fut affecté à l’envoi des journaux en province, un travail physique en horaires décalés. Les divergences ne cessèrent de s’accentuer. Ainsi, lors de la rupture du Programme commun en 1977, Gérard Filoche aurait voulu que Rouge titre « Unité PS-PCF pour battre Giscard ». La majorité trancha en faveur de « Condamnés à s’entendre ». Depuis 1969, il avait pris des responsabilités dans la direction de la Quatrième Internationale-Secrétariat Unifié (QI-SU), membre du Comité exécutif international (CEI), puis du Secrétariat unifié (SU) à partir de 1979 et jusqu’en 1994. En 1979, la majorité de la Quatrième internationale fit son autocritique sur « la stratégie de lutte armée », ce qui expliqua l’accession de Gérard Filoche au SU. Il voyagea par lui-même en Israël, en Espagne, à San Francisco, Minneapolis, Oberlin, New York. Il lutta pendant les années 1970, pour réunifier la LCR et LO, en vain. De même les relations furent étroites entre Gérard Filoche et les militants de sa tendance avec l’historien Pierre Broué, longtemps militant lambertiste. Ce dernier fit l’éloge de ces militants dans sa revue À la Lumière du marxisme (LMA n°44, juin 2001). Quant à Gérard Filoche et à ses camarades, ils annoncèrent son décès le 26 juillet 2005, sous le titre « Pierre Broué (1926-2005). Historien, militant, notre ami » (D&S n° 127, septembre 2005), appelèrent et participèrent à l’hommage qui lui fut rendu à Grenoble les 28 et 29 janvier 2006 (D&S n°131 et 132). Ils lui consacrèrent même un numéro spécial de D&S de 36 pages, supplément au n°131, janvier 2006. Il combattit également pour l’unité des « trotskistes » se réclamant tous de la Quatrième internationale mais dispersés entre les groupes de Nahuel Moreno (PST Argentine), de Jacks Barnes (SWP américain), ceux de Pierre Lambert (OCI puis PCI France) et d’Ernest Mandel (QI-SU). Il organisa à Paris une rencontre entre Hugo Blanco, militant péruvien, et Pierre Lambert, puis entre Ernest Mandel et Nahuel Moreno. Mais sans succès, regretta-t-il, le fractionnisme l’emportant chaque fois. Alors que la majorité de la LCR soutenait la direction sandiniste au Nicaragua dès 1979, Gérard Filoche – qui fit le voyage en août 1987 – déplorait le manque de démocratie dans ce pays et ne comprenait pas pourquoi son Internationale refusait d’y construire une section. Il y eu un débat notamment parce qu’il voulait défendre le mot d’ordre d’Assemblée Constituante à Managua, alors que Charles-André Udry, Ernest Mandel et Daniel Bensaïd s’y opposaient, privilégiant Comités de Défense sandinistes (CDS), syndicats ouvriers et agricoles, mouvement des femmes et de jeunes (Jeunesse sandiniste-19 juillet). De même en 1979, Filoche déplora que son organisation ne condamne pas plus fortement l’intervention soviétique en Afghanistan. Ce fut l’objet de vives controverses, qui éclairent dix ans plus tard, des prises de positions différentes, lors de la chute du Mur de Berlin. Gérard Filoche participa pendant douze ans de façon trimestrielle, aux réunions du CEI et du SU, la plupart du temps à l’Institut International pour la Recherche et l’Éducation créé par la Quatrième Internationale à Amsterdam. À la fin des années 1970, il eut la satisfaction de convaincre ses camarades de la majorité d’abandonner leur ligne antisyndicale à l’Université. En effet, après Mai 68 ils avaient décidé d’organiser leurs militants et sympathisants étudiants dans des Comités rouges, désertant l’UNEF. Devant le renforcement continu des deux UNEF, l’UNEF-US (Unité syndicale) dirigée par les Lambertistes et l’UNEF-SE (Solidarité étudiante, appelée initialement UNEF-Renouveau) dirigée par les Communistes, la LCR décida d’adhérer au MAS (Mouvement d’action syndicale), conçu comme un sas pour réintégrer l’UNEF. S’y révélèrent des militants remarquables comme Laurence Rossignol, Julien Dray ou Harlem Désir. En mai 1980, au congrès réuni à Nanterre, les trois syndicats étudiants fusionnèrent pour constituer l’UNEF-ID (Indépendance et démocratie). Julien Dray, militant de la LCR, devint vice-président et Jean-Christophe Cambadélis de l’OCI président. Cet accord désormais avec la majorité, sur l’intervention étudiante, l’abandon aussi du soutien à la lutte armée en Amérique latine par la majorité, permirent la fusion des thèses des amis de Filoche avec celles de la majorité au IIIe congrès de la LCR à Saint-Gratien, en janvier 1979 (Thèses dites T4). Malgré, ou à cause, de ce rapprochement entre la majorité et la minorité, il y eut une rupture au congrès extraordinaire de l’Haÿ-les-Roses (1er-4 novembre 1979) avec une autre tendance, la TLT (Tendance léniniste trotskiste). Celle-ci rejoignit les Lambertistes et mit fin, par cette pratique scissionniste, à tous les rapprochements en cours des différentes fractions se réclamant de la Quatrième Internationale, ceci en France et dans le monde. Mais cette embellie entre la majorité de la LCR et la minorité n’allait pas durer. Ainsi, au Ve congrès de la LCR à Nanterre (décembre 1981), la majorité reprocha à Julien Dray (« Titus » à la LCR) de s’être rendu à Biarritz, à un stage de la tendance socialiste de l’UNEF sans en avoir averti ses camarades de la Commission étudiante. Il s’agissait des échanges dans le cadre de la réunification de l’UNEF. Exclu du CC, Dray meurtri s’éloigna de la LCR pour rejoindre le PS.
Toutes ces années de débat étaient usantes. Sur le plan personnel ce furent des années heureuses. En 1978, Françoise et Gérard Filoche eurent un premier enfant, Léa, puis Emma née en 1979 et Germain né en 1983. Le film « Louise, son père, ses mères, son frère et ses sœurs », réalisé 20 ans après, en 2004, par Stéphane Mercurio et Catherine Sinet (la fille de Siné le dessinateur), raconte avec une grande sensibilité l’histoire de Louise, née en 1985, dont Gérard Filoche est le père. La mère, Sybille Fasso (Thalou à la LCR), en couple avec Sylviane, voulait un enfant. Or à l’époque n’existaient ni PMA ni GPA. Seule la méthode naturelle restait à disposition. Ayant eu l’idée de faire cet enfant avec Gérard, après avoir obtenu l’accord de Sylviane, Sybille en a parlé à Françoise qui a transmis la demande à son mari. Par amitié Gérard et Françoise ont dit oui et Louise est née. Ayant cessé après dix ans d’être permanent de la LCR, il passa un concours qui lui permit de devenir Contrôleur du travail, en poste pendant trois ans à Paris, chargé d’enquêter sur les organismes de formation professionnelle financés par l’État pour organiser des stages pour les chômeurs et pour les jeunes. Puis il passa avec succès le concours d’Inspecteur du travail en 1985. Il dut se former pendant deux ans, en internat, à l’Institut national du Travail, de l’Emploi et de la Formation professionnelle (INTEFP) situé à Marcy-l’Étoile près de Lyon. La formation reçue ne le satisfit pas pleinement car on se souciait plus de la gestion des entreprises que du droit du travail. Mais cela modifia sa vie parce qu’il y rencontra une jeune femme, Françoise Rambaud, qui milita avec lui et avec qui il eut, 15 ans plus tard, trois enfants, Louis (1999), Marie (2000) et Luc (2003). Il exerça cette profession d’inspecteur du travail, tout d’abord à Châlons-sur-Marne pendant deux ans, puis à Paris dans le IIIe arrondissement. Il le fit avec passion, n’hésitant pas à s’exprimer dans les médias, notamment à propos du respect du repos dominical. Après l’avoir mis en garde, la Directrice de l’administration générale du Ministère de l’emploi entreprit une procédure pour lui infliger un blâme pour avoir accepté d’être accompagné dans ses contrôles par des journalistes de l’émission Capital (Jean-Michel Bezat, « L’inspecteur du travail bavardait dans les rangs : au piquet ! », Le Monde, 19 février 1999). Une campagne de défense publique, dans les médias, lui permit de l’emporter, la menace de blâme fut retirée. Le Medef 77 lui fit un procès, en octobre 2000, pour avoir dit, dans une émission de Radio France Melun que « certains patrons trichaient avec le droit social ». Le syndicat patronal sera débouté et condamné à 10 000 francs pour « abus d’ester en justice ». Peu après, le numéro deux du Medef, Denis Kessler, récidiva. Il attaqua en justice Gérard Filoche et sa revue Démocratie & Socialisme pour avoir appelé à la violence contre lui. Était visée la Une du n°76 (été 2000) qui fit paraître la photo de Denis Kessler avec la mention « l’ennemi public n°1 » et les mots de « précarité », « sanctions contre les chômeurs », « démolition sociale ». Finalement, Kessler fut débouté et condamné de nouveau à 40 000 francs « pour abus du droit d’ester en justice » par la XVII° chambre correctionnelle de Paris. Cela avait été l’occasion pour Filoche d’organiser un vaste comité de soutien à la revue avec des milliers de signatures dont celles de Michel Rocard et de François Hollande. Une troisième fois il fut poursuivi à titre professionnel par les patrons de la grande société de cosmétiques Guinot Mary Coh’r pour s’être opposé au licenciement d’une déléguée du personnel. Il lui fut reproché, en juillet 2004, « d’avoir fait entrave au fonctionnement d’un Comité d’entreprise ». C’est le journal l’Humanité qui nota avec satisfaction, le 13 octobre 2011, la relaxe du « plus célèbre inspecteur du travail ». En huit ans, il y avait eu 24 audiences entre 2004 et 2013, et il remporta, avec la salariée syndiquée CGT qu’il défendait, les 14 procès. La Direction générale du travail qui lui avait refusé sans motif « la protection fonctionnelle » finit par la lui accorder en juillet 2013. Déjà le 11 décembre 1997, François Koch dans L’Express le qualifiait de « Zorro de l’inspection du travail », racontant ainsi une de ses interventions : « Arrivé au dernier des six étages d’un immeuble en construction, il grimpe sur le toit malgré l’embonpoint de ses 51 ans. Sur le zinc en pente, son sang ne fait qu’un tour en voyant un couvreur au bord du vide. « J’arrête le chantier si vous n’installez pas immédiatement une protection réelle contre les chutes. Dans ce quartier (IIIe arrondissement de Paris), depuis neuf ans, j’ai compté six chutes accidentelles. Bilan : cinq morts et un tétraplégique ». Non, répondait Gérard Filoche, « je ne suis pas Zorro, je fais mon boulot, je suis plutôt genre inspecteur Colombo ».
En 1984-1985, c’est avec enthousiasme qu’il contribua au lancement de SOS-Racisme, aidant à trouver les premiers parrains. Mais ce furent Julien Dray et Harlem Désir passé brièvement par les JCR, lui aussi au PS, qui en furent les principaux artisans. Filoche participa pendant une décennie au niveau central aux campagnes de SOS-Racisme. Puis, il s’engagea fortement dans la campagne Juquin en 1987-88. Le rénovateur communiste Pierre Juquin, exclu du PC, se présenta aux élections présidentielles d’avril-mai 1988. Dans ses Mémoires, il note avec chaleur et ironie en même temps l’implication de Filoche dans la campagne : « Le vigoureux G. Filoche [me rappelait] dans de grandes occasions un corps de doctrine, tiré de Marx et de Trotski » (Juquin, 2006, p.574). Malgré l’union réalisée entre l’extrême gauche (la LCR, la Fédération de la Gauche autogestionnaire, les Pablistes), le PSU, les amis de Juquin (les Rénovateurs en rupture de PC) et l’activité importante des Comités Juquin, les résultats furent décevants. Au soir du premier tour, le 24 avril 1988, le score de Pierre Juquin était à peine supérieur à celui d’Arlette Laguiller (2,10 % des voix et 639.000 voix et 1,99 % et 606 000 voix). Filoche en tira la conclusion que « les organisations traditionnelles ont ‘la peau dure’, on ne peut les contourner, il faut, pour saisir toute la gauche, la prendre à bras le corps, de l’intérieur » (Filoche, 1998, p.292). Après la chute du Mur de Berlin, proposant d’intituler un article sur l’événement « Champagne ! », il se vit répondre par Daniel Bensaïd* « Alkaseltzer », ses camarades ne partageant pas son enthousiasme ! Il participa encore au Congrès Mondial de la Quatrième internationale à Rimini en 1991, la même divergence se retrouva, Ernest Mandel ayant bataillé jusqu’au bout pour une « réunification socialiste de l’Allemagne » contre « une réunification de l’Allemagne ». Gérard Filoche comprit que ce qui le séparait de ses camarades majoritaires n’était pas des détails mais de profondes divergences sur le socialisme et la démocratie. Le XIe congrès de la LCR (juin 1994 à Saint-Denis) acheva de le convaincre de quitter à contre cœur une organisation qu’il avait contribué à construire pendant trente ans sans économiser ses forces. Lui et ses camarades minoritaires ne furent pas exclus, mais Daniel Bensaïd au nom de la majorité les déclara « hors normes », leur reprochant de ne plus respecter les règles minima permettant à une organisation de fonctionner ensemble. Se plaignant de ne pas avoir de moyens matériels pour exprimer leurs idées à l’intérieur de l’organisation, ils avaient fait paraître en 1992 un bulletin au titre significatif de leurs divergences, Vent d’Est, puis en 1993 un mensuel public Démocratie & Révolution, devenu au bout d’un an Démocratie & Socialisme.
Le militantisme au PS.
Ce changement de titre coïncida avec l’adhésion collective de Gérard Filoche et de la majorité de ses camarades de tendance au PS : elle fut décidée après un long débat de trois jours, en une assemblée générale de 150 militants, tenue à Revel, près de Castelnaudary (Aude) les 14-17 juillet 1994. Le vote se fit à 86 % des votants présents. Les militants – environ 150, parmi lesquels Éric Thouzeau, Jean-Jacques Chavigné, Jean-Yves Lalanne, Pierre Ruscassie, Jean-Claude Branchereau, Gérard Berthiot, Alain Fortuit, Bernard Grangeon, Christian Gourdet, Manuel Gouthière, Pierre Timsit, Catherine et Claude Touchefeu, Jacques Girma, Jean-Paul Nail, Daniel Assouline, René De Froment ou Raymond Vacheron – furent accueillis favorablement dans le bureau de Solférino par le premier secrétaire Henri Emmanuelli , qui eut ces mots : « Bienvenue avec vos grandes qualités et vos tous petits défauts ». Ils tinrent ainsi pendant vingt-cinq ans, groupés autour de leur revue théorique, pratique : D&S. Le groupe s’était donné comme principe que cette revue mensuelle servirait prioritairement de fil à plomb, de référence, d’expression publique indépendante. Ils associèrent leurs nouveaux camarades de « Questions socialistes » et de « À gauche », et Jean-Luc Mélenchon devint ainsi membre du Comité de rédaction. La revue, 24 pages, était éditée à Toulouse par Jacques Girma, gérée notamment par Bernard Grangeon et distribuée par Pierre Timsit, sur abonnement (de 1000 à 4000) dans soixante-dix départements où elle avait des correspondants publics. De même, Filoche commença à publier des livres, ce que la LCR, dit-il, ne l’autorisait pas à faire. Dans un livre, C’était la ligue, publié en 2019 (Éd Syllepse et Arcane 17) par deux militant-e-s du NPA/LCR, par ailleurs vivement contestés par Gérard Filoche qui leur répondit « La Ligue, ce n’était pas ce que vous en dites », la version des faits est un peu différente. La direction de la Ligue aurait « désavoué » Gérard Filoche, reconnaissent-ils, lors de la parution du livre co-rédigé avec Julien Dray militant du PS à l’époque, Les Clairons de Maastricht(1992) (C’était la Ligue, 2019, p.485). Ceci dit, à partir de son départ de la LCR, Filoche multiplia les livres. Il en fit paraitre une trentaine de 1995 à 2017 dont un travail de mémorialiste sur les trente années passées à la LCR : 68-98, une histoire sans fin, mémoires (1998), suivi d’un deuxième tome sur ses vingt-cinq ans au PS (Éd. Atlande 2021). Un article des statuts du PS le permettant, leur ancienneté dans les rangs de la LCR fut prise en compte dès 1994 et ils obtinrent tout de suite des responsabilités importantes. Ainsi Gérard Filoche fut désigné au congrès de Liévin (18-20 novembre 1994) membre du Conseil national. Aux élections européennes de 1999, il figura en 49e position sur la liste du PS. Il fut membre du Bureau national du PS de 2000 à 2005 (puis de nouveau de novembre 2012 à novembre 2016). Cependant, son ancrage à Combs-la-Ville, petite ville de Seine-et-Marne, fut plus difficile. Bien que secrétaire de la section locale du PS (de 1997 à 2001), des manœuvres, est-il persuadé, empêchèrent qu’il soit désigné comme candidat socialiste à la députation en 1997 et pour les municipales de 2001. À l’issue d’un vote serré dans la section lui fut préféré un autre candidat pour diriger la liste d’union de la gauche, battue dès le premier tour par le candidat RPR (D&S n°83, mars 2000, p.11). L’essentiel des efforts de Gérard Filoche au cours de cette période sera d’œuvrer à l’unité entre les forces ou tendances situées à la gauche du PS – tout en gardant le maximum de contacts avec la gauche hors PS. Au cours de l’été 1995, à Brioude (Haute-Loire), ses amis de Démocratie et Socialisme avaient fusionné avec ceux de la Gauche socialiste (GS) de Julien Dray, Marie-Noëlle Lienemann et Jean-Luc Mélenchon. Il retrouva dans la nouvelle tendance Harlem Désir et Isabelle Thomas, mais aussi sa fille Léa Filoche, un temps présidente de la Fédération indépendante démocratique lycéenne (FIDL). En cette occasion, Jean-Luc Mélenchon fut amené à modifier son opinion sur l’Europe, lui qui avait voté pour Maastricht en 1991. C’était l’une des questions à résoudre pour que D&S fusionne avec la GS. La puissance du mouvement social de novembre-décembre 1995 eut des répercussions fortes au PS. Dans les trois grandes conventions nationales du PS de mars, juin et décembre 1996 initiées par Lionel Jospin (qui avait remplacé Henri Emmanuelli après son excellent score à la présidentielle de 1995), la gauche socialiste marqua de solides points. Le texte de févier 1996 « Tourner la page de Maastricht », obtint 52 % des voix – véritable coup de tonnerre – ce qui était révélateur de l’opinion réelle de la base des adhérents socialistes. Ensuite, leurs amendements en faveur d’une loi pour les 35 heures sans perte de salaire, pour le contrôle préalable administratif des licenciements, pour des « accords majoritaires » dans les entreprises, pour l’avis conforme des Comités d’Établissement, obtinrent entre 13 et 33 % des voix. Enfin en décembre 2016, la Gauche socialiste obtint des bons scores en faveur de la redistribution des richesses, de 17 à 33 % des voix. D&S et Filoche, du fait de ces résultats qui touchaient aux questions sociales, se sentirent efficaces. Il fut heureux également, à l’occasion de ces débats, de pouvoir faire une série de réunions dans le Parti socialiste, parcourant une quarantaine de départements : « L’enjeu était tout autre que les centaines de militants, certes valeureux mais isolés, de la LCR […] On était non seulement écoutés mais très bien entendus » (Filoche, 1998, p.333). Il s’employa notamment à défendre un contenu contrôlé et rigoureux des 35 heures. Il fut nommé par Lionel Jospin, pendant deux ans, de 1999 à 2001, « personnalité qualifiée » au Conseil économique et social : il y rédigea et y fit adopter un « Avis » sur « vingt ans de CHSCT ». Il milita également de manière infatigable pour préserver un système des retraites favorable aux salariés. Cependant, co-fondateur de Copernic en 1998 et membre du conseil scientifique d’ATTAC, il restait lié à des lieux de réflexion de la gauche radicale. Son objectif était d’obtenir dans le PS un rapport de forces favorable à la gauche socialiste, suffisant pour faire basculer l’essentiel du parti du côté du mouvement social lorsqu’un autre mai 68 surviendrait. La gauche socialiste se définissait, disait-il, « à la fois, comme un courant du parti et un courant de la société ». N’ayant aucune illusion sur une victoire possible en interne contre l’appareil, contre « les sociaux libéraux », la gauche socialiste avait fait le choix délibéré de s’appuyer sur le mouvement social. Ce fut le cas lors de la grande grève de 1995, de la bataille pour le contenu des 35 heures, de la campagne pour le « non » au Traité constitutionnel européen, de la lutte contre le Contrat Première Embauche (2006) et des batailles successives pour la défense des retraites à 60 ans à taux plein. La gauche socialiste se construisit de façon chaotique de 1995 à 2002 avec Dray, Désir, Lienemann, Mélenchon, Rossignol. Elle atteignit de 10 % à 13 % puis 17 % des voix aux congrès de Liévin (1994), de Brest (1997), de Grenoble (2000). Dray et Mélenchon se firent la guerre entre eux en 2002 à la suite de la défaite de Lionel Jospin à la Présidentielle, l’un voulant choisir Hollande, l’autre voulant choisir Fabius comme successeur et candidat, c’est-à-dire décider d’emblée d’une « écurie présidentielle ». Le groupe D&S refusa cette méthode. Pour lui, il fallait créer un rapport de forces à gauche avant de discuter avec l’un ou l’autre des candidats potentiels. Filoche fit un ultime rapport au nom de la Gauche socialiste à l’université d’été de Nantes, fin août 2003. Ses thèses furent adoptées à l’unanimité des 850 présents, mais dès le lendemain, Mélenchon et Dray, qui les avaient pourtant votées, scissionnaient. Le groupe se sépara alors entre « Nouveau Monde » (NM créé et dirigé par Emmanuelli et Mélenchon) et « Nouveau Parti socialiste » (NPS animé avec Arnaud Montebourg, Vincent Peillon, Benoit Hamon et Julien Dray au début). Mais dès avant le congrès de Dijon (mai 2003), Julien Dray, Harlem Désir, Laurence Rossignol, Marie-Noëlle Lienemann, rejoignirent la majorité de François Hollande. Selon Filoche, dans le tome 2 de ses mémoires, Dray lui avait demandé de rejoindre Hollande : avec lui, « ce sera une direction faible et nous en serons la force, mais pour cela il faut que tu arrêtes D&S et rompe avec tes amis ». Filoche refusa et ce fut la rupture totale avec Dray alors qu’ils se connaissaient pourtant depuis la LCR en 1976. Dray fut alors nommé porte-parole du PS. Lors de ce même congrès, les deux sensibilités de gauche, divisées, NM et NPS obtinrent chacune entre 15 et 17 % des mandats, un troisième courant « Forces Militantes » (FM) avec Marc Dolez obtenant 5 %. D&S et Filoche bataillèrent pour l’unité de NM, de NPS et de FM, notamment lors d’un grand meeting unitaire pour le « non » au Traité constitutionnel européen (TCE) à Pâques 2004, à la Halle Carpentier, à Paris. Le 1er décembre 2004, lors du référendum interne au PS sur le « oui » ou le « non » au TCE, il n’y eut que 42 % des voix (au lieu des 52 % de 1996) pour le « non ». Des manœuvres frauduleuses de la direction avaient-elles altéré la sincérité du vote comme l’ont pensé les minoritaires et comme l’a affirmé Gérard Filoche ? Toujours est-il que dès le lendemain, Filoche fit campagne publique pour le « non », en Essonne, et en février, avec Alain Krivine, Marie-George Buffet, Francine Bavay, au rassemblement val-de-Marnais de Fontenay-sous-Bois. Jean-Luc Mélenchon ensuite fera campagne « pour moi c’est non », Henri Emmanuelli « cette fois c’est non ». Filoche parcourut la France pour défendre un « non socialiste » avec ses camarades socialistes Marc Dolez et Jacques Généreux. Du 9 mars au 25 mai, de La Rochelle à Strasbourg, ils tinrent 86 réunions, s’adressant à 35 000 personnes dans les 20 régions. (D&S n° 125-6, été 2005). Après que le « non » l’eut emporté avec 55 % des voix, le 29 mai 2005, Pierre Moscovici lui expliqua « à 51 % on vous excluait Mélenchon et toi, mais à 55 % on ne peut pas ». Plus tard, ses efforts pour unir, d’abord ses camarades de la gauche à l’intérieur du PS, et plus largement les divers partis de la gauche ne furent pas couronnés de succès. Au congrès du PS du Mans (octobre-novembre 2005), en dépit de la victoire du « non » cinq mois plus tôt et en plein soulèvement des banlieues, Mélenchon se rallia à Hollande, et « fit synthèse » en même temps qu’Henri Emmanuelli, Vincent Peillon, Benoît Hamon, Julien Dray, Marie-Noëlle Lienemann. Seuls Montebourg, Filoche, Dolez refusèrent la synthèse, les deux derniers créant un courant commun, FM-D&S, le premier préférant en rester séparé. La sanction pour Filoche fut sa mise à l’écart du Bureau national en novembre 2005. Cet entêtement en faveur de l’unité était sous-tendu par l’idée qu’il existe un salariat, classe sociale majoritaire qu’il s’agit d’unifier pour réussir la révolution. Il développa ses idées dans son ouvrage théorique Dix questions sur le salariat paru à La Découverte en 2006. À partir de cette date (2006), la direction du PS menaça de l’exclure à plusieurs reprises. Tout d’abord on lui reprocha d’avoir tenu des meetings pour le « non » au référendum européen avec Alain Krivine. Quand il envoya un tweet cinglant, le 20 octobre 2014, à propos du décès accidentel à Moscou, du grand patron de Total, Christophe De Margerie, Manuel Valls alors Premier ministre alla même jusqu’à affirmer en pleine Assemblée nationale, qu’il n’avait plus sa place au PS. La commission des conflits du parti se saisit de l’affaire qui traîna six mois et fut abandonnée. On lui reprocha également un tweet mettant en cause les « cars Macron » en septembre 2015, lors d’un terrible accident de car survenu à Puisseguin (Gironde). Une nouvelle procédure fut engagée, en vain, contre lui pour avoir fait campagne contre la loi El Khomry, en participant à un meeting avec d’autres forces de gauche au Mans (Sarthe), le 21 mai 2016. Tout au long des années 2002-2011, la gauche du parti s’était retrouvée en ordre dispersé. Les dirigeant.e.s Hollande, Aubry, Delanoë, Royal se disputèrent âprement au congrès de Reims en automne 2006. Filoche avait tenté de reconstituer avec Emmanuelli, Hamon, Lienemann et Mélenchon une nouvelle « gauche socialiste » appelée « Un Monde d’avance ». Mais Jean-Luc Mélenchon les abandonna le 8 novembre, peu avant le congrès, en publiant un communiqué de presse affirmant que « Royal avait gagné le congrès dans les urnes et dans les cœurs et le PS allait au Modem comme la rivière va à la mer ». En 2006 en prévision des Présidentielles à venir, affaiblie et divisée la gauche socialiste dut choisir entre Dominique Strauss-Kahn, Ségolène Royal et Laurent Fabius. Celui-ci ayant pris parti pour le « non », elle soutint plutôt Fabius que Royal. Marc Dolez ayant refusé de soutenir la candidate finalement désignée à l’issue de la Primaire, FM se sépara de D&S, et Filoche participa à contre cœur à la campagne présidentielle de Ségolène Royal en 2007, multipliant cependant à nouveau réunions et meetings en province. De 2004 à 2008, Filoche mena une campagne très active contre « la recodification du code du travail », ce qui le fit connaître davantage sur le terrain et fit progresser D&S. Filoche et D&S se battirent également fortement pour la défense des retraites face à Nicolas Sarkozy avec des centaines de réunions, d’articles, de livres, d’exemplaires de la revue. Benoît Hamon, premier signataire de la motion « Un Monde d’avance », ne tint pas sa parole de faire revenir Filoche au BN une fois le congrès passé si bien que les amis de D&S se retrouvèrent isolés alors que Martine Aubry était pourtant élue de justesse Premier secrétaire avec leurs voix. D&S pesa peu dans l’élaboration du programme du PS pour 2012, sauf pour y introduire la mention qu’il fallait « reconstruire le code du travail » (dont c’était le centenaire).
Dès le début du quinquennat Hollande, D&S prit position pour le rejet du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) ou Pacte budgétaire européen imposé par Angela Merkel et Nicolas Sarkozy pour qui l’austérité budgétaire et sociale était un dogme. Une fois élu, François Hollande s’y rallia. Seuls dix-sept des vingt députés élus sur la base de la motion « Un Monde d’avance » votèrent contre, Arnaud Montebourg et Benoît Hamon étant au gouvernement. Alors en vue du congrès de Toulouse de novembre 2012, Filoche et D&S hésitèrent à faire leur propre motion. Mais Marie-Noëlle Lienemann, Emmanuel Maurel, Jérôme Guedj, vinrent leur proposer de reconstruire une nouvelle gauche socialiste. Benoît Hamon, ministre, les menaça violemment « on vous réduira à 4 % ». La nouvelle gauche socialiste obtint, malgré cela, plus de 13 % et les amis de Gérard Filoche revinrent au BN. Dès le lendemain du congrès de Toulouse, Hollande publiait le rapport Gallois, et faisait le choix de la « politique dite de l’offre » contre la « politique dite de la demande ». C’était faire le pari que le patronat accepterait de créer des emplois en échange de concessions financières et sociales faites par le gouvernement. Ce fut le début d’une autre longue bataille interne contre la dérive droitière du gouvernement de Manuel Valls nommé et soutenu par le Président Hollande. Filoche avec D&S fit une campagne publique importante (meetings, articles, vidéos), contre l’Accord national interprofessionnel (ANI) sur le télétravail du 11 janvier 2013, qui selon eux se proposait de faire reculer le droit du travail. Par ailleurs, le 2 avril 2013, Filoche fit le « buzz » sur les chaînes de télévision et les réseaux sociaux, en condamnant avec force Jérôme Cahuzac, le Ministre du Budget en charge de la lutte contre la fraude fiscale. Or il avait non seulement fraudé le fisc mais menti effrontément sur sa propre fraude. Cela valut à Gérard Filoche d’être invité sur toute les chaînes, pendant plusieurs années, ce qui cessa à partir de la victoire d’Emmanuel Macron en juin 2017. Au BN du PS, face aux dirigeants du parti Harlem Désir et Jean-Christophe Cambadélis, Filoche prit l’habitude de défendre semaine après semaine une alternative de gauche et de publier ses interventions sur son blog. Il appela, en créant un site à ce seul effet, à la démission d’Emmanuel Macron, ministre de l’Économie de Manuel Valls et de François Hollande. 17 000 militants socialistes s’associèrent à lui en signant un texte. En vue du congrès de Poitiers, D&S milita pour une seule grande tendance de toutes les gauches socialistes et en effet, ils réussirent à rassembler, Emmanuelli, Hamon, Montebourg, Maurel, Lienemann, Guedj, Amirshahi, Fred Lutaud, autour du premier signataire, choisi comme consensuel, Christian Paul. Cette « dernière » gauche socialiste atteignit un record historique avec près de 30 % des voix. Mais Martine Aubry et ses amis ayant refusé de signer une motion commune, la majorité ne fut pas atteinte . Cambadélis avait fait un compromis d’importance avec Aubry, acceptant le rejet de « l’inversion de la hiérarchie des normes » dans le code du travail, selon laquelle les accords signés dans l’entreprise pourraient être moins favorables par rapport aux dispositions négociées au niveau de la branche. Pourtant, Hollande et Valls l’imposèrent dans la loi El Khomri. Les députés que la presse appela « les Frondeurs » s’opposèrent au projet de François Hollande de créer une « Déchéance de nationalité » pour les délinquants. Puis ils furent assez nombreux à l’Assemblée pour bloquer la loi El Khomry. À travers cette loi, expliquait Filoche, François Hollande opérait une rupture historique, théorique, pratique avec cent ans de Code du travail. Il déclarait « adapter les droits des salariés aux besoins des entreprises » alors que depuis un siècle, « le code du travail visait à adapter les entreprises aux besoins et droits des salariés ». Mais le Premier ministre Manuel Valls n’hésita pas à réprimer les manifestations de rues et à utiliser le 49-3 pour imposer au Parlement la loi El Khomri. Malgré une mobilisation très importante (manifestations, meetings, vidéos), à laquelle Gérard Filoche prit une part active – son engagement de deux décennies pour le droit du travail l’y prédisposait -, rien ne parvint à infléchir le gouvernement. Bien que François Hollande ait bénéficié au début de son mandat de Président de la République d’une assise politique importante – majorité à l’Assemblée nationale et au Sénat, deux grandes villes sur trois, 61 départements sur 100 et vingt régions sur vingt-deux étant dirigés par la gauche -, cinq élections successives furent perdues. Le Rassemblement national ne cessait de gagner en influence. La stratégie mise en œuvre par Manuel Valls et François Hollande qui consistait à vouloir transformer le PS en « parti progressiste » pour nouer « une belle alliance populaire », fut catastrophique selon Gérard Filoche. Elle consistait, disait-il, à vouloir se débarrasser du Parti socialiste. Pour toutes ces raisons, Filoche réclama le retrait de Hollande de l’élection présidentielle de 2017 au BN de janvier 2016 et toute l’année 2016, jusqu’à ce que, empêché de toutes parts, Hollande soit obligé de se retirer. Il ne lui pardonnait pas d’avoir fait perdre au PS toutes les élections précédentes en ayant tenté, avec Manuel Valls, de le couper de ses racines et de le transformer en un parti « progressiste ». Le 21 janvier 2016 il avait participé, en vue des présidentielles à venir, à une réunion nationale de toute la gauche au plus haut niveau pour parvenir à une plateforme commune et à un candidat commun. Dans son esprit cela permettrait à Mélenchon de l’emporter contre Hollande, et, avec un seul candidat de gauche, d’éviter le désastre face à la droite. Mais Jean-Luc Mélenchon refusa et présenta sa candidature sur TF1. Il ne resta plus qu’à organiser des « primaires socialistes ouvertes ». Elles furent fixées aux 21 et 29 janvier 2017. Filoche se déclara candidat sur un programme qu’il résuma par les chiffres 1800-32-60-20-5 et 50 % : le Smic à 1800 euros, la semaine de 32 heures, la retraite à 60 ans, aucun salaire supérieur à 20 fois le Smic et pas plus de 5% de travailleurs précaires dans l’entreprise, 50 % d’énergies renouvelables. En compétition avec ses autres camarades candidats de la gauche socialiste, Lienemann, Montebourg, Hamon, il l’emporta à l’applaudimètre devant toute la gauche socialiste réunie à la Rochelle le 11 septembre 2016. Mais ses camarades avaient davantage de sièges au Conseil National du parti. Ils bloquèrent donc toutes les signatures nécessaires selon Cambadélis pour être pré-candidat officiel dans le PS. Le Canard Enchainé titrait « Filoche leur fout la pétoche », mais le 17 décembre il fut écarté de la primaire faute d’un nombre de parrainages suffisant. Il en avait déposé dix-sept ce qui était le nombre total exigé, mais ils distinguèrent entre les titulaires et les suppléants du CN. À défaut d’être candidat, il soutint d’abord Arnaud Montebourg puis Benoît Hamon, et ils parvinrent ainsi à l’emporter sur Manuel Valls soutenu par François Hollande. Ainsi, la gauche du Parti socialiste l’avait emporté contre le centre et la droite du parti. Mais il ne fut pas possible ensuite de convaincre Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon de s’entendre, regretta Gérard Filoche. Pourtant ils avaient été l’un et l’autre pendant vingt ans membres de la gauche du PS. Filoche mena du 29 janvier au 23 avril 2017 une bataille acharnée et publique pour un accord entre les deux gauches, Hamon et Mélenchon. Guillaume Balas, proche de Hamon lui demanda mi-mars 2017 de rédiger un projet d’accord en huit points, ce que Filoche fit et transmit. Mais en vain, les deux refusant au cours d’un dîner en tête à tête et décidant de s’opposer jusqu’au bout. Tout cela se termina par la défaite : le 23 avril 2017, Jean-Luc Mélenchon obtint 19 % des voix et Benoît Hamon 6 % alors qu’ensemble ils étaient crédités de 29 à 31 % des voix. Le soir, Gérard Filoche déclara à la télévision que « c’étaient les deux dirigeants de gauche les plus bêtes du monde, car s’ils s’étaient alliés, l’un serait président et l’autre premier ministre ». Malgré son score final non négligeable, Jean-Luc Mélenchon ne fut pas présent au second tour qui fut disputé entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen. Filoche et ses camarades de D&S vécurent cette victoire d’Emmanuel Macron à la présidentielle de 2017 comme une grave défaite pour la gauche et pour le programme « social d’abord » qu’ils défendaient depuis des décennies. Il ne leur fut pas possible de tirer le bilan du quinquennat Hollande au Congrès du PS à Aubervilliers, les 7 et 8 avril 2018, la direction ayant modifié les statuts du PS pour les empêcher de déposer une motion. La rupture était dès lors consommée. Filoche fit dans le livre Macron ou la casse sociale (Éditions L’Archipel, 2018) une analyse critique et détaillée de la politique d’Emmanuel Macron qu’il qualifia de « thatchérienne ». Il condamna cette volonté de construire « une France start up », « une société sans statut », « post salariale », « ubérisée », supprimant les cotisations sociales. Cette déception expliqua sans doute la rapidité avec laquelle le 17 novembre 2017, à 22 heures, Gérard Filoche relaya un tweet contenant un photomontage contestable, sur lequel on voit en premier plan Emmanuel Macron affublé d’un brassard rouge orné d’un dollar, avec un arrière-plan plus sombre, où sur des drapeaux américain et israélien sont esquissés les visages de Patrick Drahi, Jacob Rothschild et Jacques Attali trois personnalités juives. Bien que s’étant aperçu quarante minutes après de l’existence de ce second plan, ayant effacé le tweet et s’en étant excusé, ses ennemis le taxèrent d’antisémitisme. Aussitôt le premier secrétaire par intérim du PS, Rachid Temal, annonça dans la presse que Filoche allait être exclu pour antisémitisme, une décision applaudie notamment par Manuel Valls qui affirma qu’il y a bien longtemps qu’on aurait dû le faire. En fait, il n’y eut aucun vote au PS, ni aucune suite statutaire. Le NPA, issu de la LCR, tout en condamnant le photomontage se s’opposa fermement à l’accusation d’antisémitisme : « Il a, il y a des années, quitté la LCR pour adhérer au PS. Au sein de ce parti de tous les reniements, à sa façon, il a défendu les intérêts du monde du travail. C’est en fait ce qu’on lui reproche » (site internet du NPA et L’Anticapitaliste] n°406, 23 novembre 2017, p.3 : « Filoche antisémite !!! »). Daniel Mermet ironisa « Filoche est aussi voleur, violeur et pédophile ? ». Filoche publia un Manifeste contre le racisme et l’antisémitisme. Une pétition « Pour Gérard Filoche. Pour l’honneur d’un militant » réunit des milliers de personnes, parmi lesquelles Guy Bedos, Patrick Chamoiseau, Annie Ernaux, Gérard Mauger, Gérard Noiriel, François Ruffin, Ernest Pignon Ernest : « Nous ne pouvons accepter cette accusation scandaleuse [d’antisémitisme], cette atteinte portée à l’honneur d’un militant qui a consacré sa vie entière à défendre les libertés syndicales et le code du travail, à lutter contre le racisme et l’antisémitisme (il fait partie des fondateurs de SOS-Racisme) ». Inculpé pour incitation à la haine raciale à la suite de la demande de neuf associations (Le Crif, la Licra, France-Israël…), il eut comme témoins Gus Massiah, André Rosevègue, Benjamine Veill, André Langaney. Le Parquet retira sa plainte en cours d’audience et il fut finalement relaxé en novembre 2018, les parties civiles n’osant pas faire appel. C’était le quatrième procès contre lui en vingt ans, gagné celui-ci aussi.
En lutte avec la Gauche démocratique et sociale (GDS)
Dans une interview au Journal du Dimanche, le 13 janvier 2018, il annonça que ses amis et lui quittaient le PS : « Je pars avec mes amis pour construire notre réseau, la Gauche démocratique et sociale (GDS). J’ai loyalement débattu et milité pendant vingt-cinq ans au PS. Le quinquennat Hollande a été un véritable choc […] Bref, un retour en arrière d’un siècle ». Tel Sisyphe, il poursuit son combat de toujours dans le cadre de la GDS, tenter de rapprocher les diverses forces de gauche, car comme le dit un des slogans de sa formation qui apparaît en bonne place sur son site : « Sans unité rien de grand n’est possible ». La revue mensuelle D&S en était à sa vingt-huitième année, complétée par une lettre hebdomadaire sur internet, un site, des blogs, une chaîne U-tube et 50 000 « followers » sur face book et sur twitter. Quant au mouvement des Gilets jaunes, il le soutint dès le début. Au journaliste Jean-Baptiste Mendès qui l’interrogeait le 23 janvier 2019, il répondait : « Il y a 5 % de casseurs, de fachos, mais 95 % des gens sont de gauche et cherchent une solution sociale » (Site Sputnik consulté le 19 juillet 2020). À vingt-cinq reprises, il alla sur le terrain pour les soutenir, dans le Vaucluse, la Drôme, les Vosges ou à Lorient et à Dreux (Eure-et-Loir) deux fois, en avril 2019 et le samedi 1er février 2010 (L’Écho républicain, 1er février 2020). En décembre 2019 et janvier 2020, il s’engagea encore pleinement en soutien de la grande grève contre la remise en cause du système des retraites. Puis encore, contre la façon dont la politique budgétaire de d’Emmanuel Macron, disait-il, avait désarmé le pays face à la pandémie du COVID19.

 

POUR CITER CET ARTICLE : 

https://maitron.fr/spip.php?article233874, notice FILOCHE Gérard (Roger Norman, Matti, Matti Altonen). par Jean-Paul Salles, version mise en ligne le 7 novembre 2020, dernière modification le 7 novembre 2020.

Par Jean-Paul Salles

Gérard Filoche, Marc Dolez, Jacques Généreux

 

ŒUVRE : -Nombreux articles dans L’Étincelle (JCR Rouen), La Lutte continue et La Taupe rouge(LC/LCR Rouen), RougeDémocratie&RévolutionDémocratie&SocialismeL’Humanité-DimancheSiné-HebdoPolitis. — Textes pour sa tendance dans les Bulletins intérieurs de la LCR aux noms variés : Bulletins d’histoire et de sociologie du XXe siècle, Centre d’étude et de recherche socialiste ou plus simplement Cahier du militant.
Ses livres :  Printemps portugais, éditions Actéon, 1984 ; -Le socialisme est une idée neuve, (collectif), 1991 ;-avec Julien Dray, Les clairons de Maastricht, Ramsay, 1992 ; Édouard Balladur et les 5 millions de chômeurs, L’Harmattan, 1993 ; Pour en finir avec le chômage de masse, La Découverte, 1995 ; Le Travail jetable, Ramsay, 1997 ; Le Travail jetable, non, les 35 heures, oui, Ramsay, 1999 ; Collectif, La République sociale, textes de référence, L’Harmattan, 1999 ; avec Harlem Désir, Julien Dray, Marie-Noëlle Lienemann et Jean-Luc Mélenchon, Sept jours dans la vie d’Attika, Ramsay, 2000 ; avec Sylvain Chicote, Bien négocier les 35 heures, guide pratique (et critique) à l’usage des salariés, La Découverte, 2001 ; avec Jean-Jacques Chavigné, Retraites : réponse au Medef, Ramsay, 2001 ;  Ces années-là … quand Lionel, Ramsay, 2001 ; 20 ans de CHSCT, étude pour le Conseil économique et social, éditions Journal officiel, 2001 ; Postface aux textes de Marx-Engels sur l’Afghanistan, Mille et une nuits, 2001 ; Carnets d’un inspecteur du travail, Ramsay, 2004 ; avec Gérard Berthiot, Jean-Jacques Chavigné, SOS Sécu !, Au Bord de l’eau, 2004 ; À celle ou celui qui portera les couleurs de la gauche en 2007, Ramsay, 2004 ; On achève bien les inspecteurs du travail, Gawsewitch, 2004 ; La vie, la santé, l’amour sont précaires. Pourquoi le travail ne le serait-il pas ?, Gawsewitch, 2006 ; Mai 68 histoire sans fin. Liquider mai 68, même pas en rêve, Gawsewitch, 2007 ;Salariés, si vous saviez…, La Découverte, 2008 ; Les caisses noires du patronat, Gawsewitch, 2008 ; Présentation du Droit à la paresse de Paul Lafargue, Le Passager clandestin, 2009 ; Les nouveaux carnets d’un inspecteur du travail, Gawsewitch, 2010 ; avec Jean-Jacques Chavigné, Une vraie retraite à 60 ans, c’est possible, Gawsewitch, 2010, rééd. actualisée, 2013 ; 68-98, histoire sans fin, Tome 2, la gauche socialiste, Gawsewitch, 2011 ; avec Jean-Jacques Chavigné, Dette indigne !, Gawsewitch, 2011 ; avec Cyril Gispert, Jean-François Claudon, Jean-Jacques Chavigné, Le choc, après Cahuzac, Gawsewitch, 2013 ; Comment résister à la démolition du Code du Travail ?, Le Vent se lève, 2014 ; Vive l’entreprise ?En défense du Code du Travai
l, Hugo & Cie, 2015 ; Comment résister aux lois Macron, El Khomri et cie ?, Le Vent se lève, 2016 ; avec Patrick Raynal, Cérium (roman), Le Cherche Midi, 2017 ; avec Richard Abauzit, Décortiquer les ordonnances Macron pour mieux les combattre, Éditions Démocratie et Socialisme, 2017 ; La révolution russe racontée aux ados (et à leurs parents), Éd. L’esprit du Temps ; Manifeste contre le racisme et l’antisémitisme, 2018, éditions Démocratie et Socialisme ; Macron ou la casse sociale, L’Archipel, 2018 ; Le social au cœur. Mai 68 vivant. Mémoires, L’Archipel, 2018.
SOURCES : Gérard Filoche, 68-98, une histoire sans fin, mémoires, Flammarion, 1998 et réédition augmentée, 2018. — Gérard Filoche, Mai 1968. Une histoire sans fin. Tome II 1994-2018 : les années PS, Atlande, 2021. — le Blog de Gérard Filoche. — notice Wikipédia sur Gérard Filoche consultée en juillet 2020. — site de la Gauche démocratique et sociale (GDS). — Archives privées Gérard Filoche (APGF) consultées en 2003. — revues mensuelles Démocratie&Révolution et Démocratie&Socialisme (28 années). — Thierry Pfister, « Les Trotskystes à l’école », Le Monde, 25 août 1971. — Jean-Claude Laumonnier, « Mai 68 à Rouen », L’Anticapitaliste mensuel, n°98, mai-juin 2018. — Pierre Juquin, De battre mon cœur n’a jamais cessé. Mémoires, L’Archipel, 2006. — Alain Krivine, Ça te passera avec l’âge, Flammarion, 2006. — Jean-Paul Salles, La Ligue communiste révolutionnaire (1968-1981). Instrument du Grand Soir ou lieu d’apprentissage ?, PUR, 2005. — Hélène Adam, François Coustal, C’était la Ligue, Syllepse et Arcane 17, 2019. — Jacques Moreau, Les socialistes français et le mythe révolutionnaire, Hachette Littérature, Collection Pluriel, 2003. — « Louise, son père, ses mères, son frère et ses sœurs », Le Monde, 6 février 2005. — « Louise a deux mères, un père et une belle-mère », nouvelobs.com, 26 janvier 2017. — Le film « Louise, son père, ses mères, son frère et ses sœurs », de Stéphane Mercurio et Catherine Sinet (2004). — En 2003, rue Rambuteau, entrevue avec Gérard Filoche que je remercie de m’avoir ouvert ses archives avec libéralité. — Été-automne 2020 : nombreux échanges par mail.

 

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